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La lettre envoyée par Michel Surya de la revue ''Lignes''




Alain Tizon
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Réponse d'Alain Tizon à l'enquête de la revue ''Lignes'' ( Alain Tizon , 2000)

Réponse de François Lonchampt à l'enquête de la revue ''Lignes'' ( François Lonchampt , 2000)


TEXTES DIVERS

Réponse d'Alain Tizon à l'enquête de la revue ''Lignes''
Alain Tizon, 2000

ENQUÊTE DE LA REVUE "LIGNES" SUR LE ''DÉSIR DE RÉVOLUTION'' (N°4, JANVIER 2001)


A quoi bon avoir le désir de révolution si on pense qu'une révolution n'est pas possible ? Par fidélité à une cause qu'on estime perdue ? Par esthétisme ? Dandysme ? Ou par une manière qui se veut originale, différente, de conforter son narcissisme ? Ce désir est pourtant partout pour celui qui veut lire  ! Dans les rues, sur les places et les murs de nos villes, particulièrement là ou la " crise " répand ses malheurs, il s'inscrit sur les visages et les corps de ceux qui, exploités, brutalisés par elle, d'autant plus durement qu'ils n'ont pas d'échappée possible, sont malmenés par un système sur lequel ils n'ont aucun pouvoir, ou si peu... La lutte continue, il n'y a qu'à regarder autour de soi et en soi pour voir combien les forces adverses ne cessent leur travail d'épuisement. C'est vrai, une classe est momentanément vaincue, constamment sur la défensive (mais combien est fraîche la mémoire des luttes qui furent vives), et c'est avec vigilance qu'on lui sert nombre de plans sociaux tandis que son environnement fait l'objet de toutes les attentions, de la cage d'escalier repeinte à l'ancienne usine transformée en centre culturel. Actuellement, et sans doute plus que jamais, il faut que ceux qui sont vaincus économiquement le soient aussi culturellement, il ne doit rester qu'une histoire, celle des vainqueurs ! Celle des vaincus ne sera présentée que sous ses aspects négatifs afin que le nouvel ordre économique qui se met en place puisse régner sereinement. Que l'histoire s'arrête fut toujours le grand rêve des classes privilégiées, mais les partisans les plus lucides de la loi du profit savent qu'il n'en est rien, qu'elle ne s'arrêtera jamais.

Cependant, le désir de révolution devient méprisable s'il n'exprime qu'une facilité pour meubler une pensée confortable. Ce qui se porte d'ailleurs fort bien de nos jours, où il est plus facile de se contenter de rallier un programme tout fait plutôt que d'affronter la difficulté de penser. Alors que tout ou presque est à revoir, théoriquement et pratiquement, pour reconstruire. Et combien cela est difficile aujourd'hui dans ce camp dévasté des révolutions... ! Il y a cet héritage à faire fructifier qui vient de l'histoire de ce désir, avec les révoltes et les révolutions qui en furent l'aboutissement. Les motifs d'indignation ne sont pas moindres qu'hier. Je pourrai aligner des chiffres... Ces comptes ne seraient pas méprisables. Je pourrai y joindre du qualitatif, ce qui sent déjà plus le privilégié des pays riches. Est-ce nécessaire ?

Quant à ceux qui n'ont pas ce désir, comment vivent-ils ? Sur quoi repose leur vie ? Quel sens lui donnent-ils ? Quel avenir envisagent-ils pour ceux que nous laisserons derrière nous ? Comment est-ce possible de ne pas avoir le désir de révolution ? Rien à voir évidemment avec celui, celle, qui a le tentation de renoncer, si compréhensible devant l'inégalité féroce du rapport de force, si humaine, et renoncer vaudra toujours mieux que feindre. Nous sommes peu, la tâche est ingrate c'est certain, le plus souvent engagée sous les sourires, les risées et les rires, mais en connaissez-vous de plus noble ? Dans ce monde désordonné qui sert la prospérité des nantis, où le confusionnisme triomphe, n'est-ce pas le plus grand risque ?

Déjà un peu de joie, de fraîcheur sur un visage, et nous n'en revenons pas. Bientôt sérénité, bonheur seront privatisés, chosifiés, vendus si nous n'y prenons garde, comme le reste, tout le reste. Le temps presse...

Cordialement à vous,

Alain Tizon